Sade, donatien-alphonse-françois de (1740–1814)

SADE, DONATIEN-ALPHONSE-FRANÇOIS DE (1740–1814), écrivain français. Appartenant à l'une des plus anciennes familles nobles de France, le marquis de Sade fréquente le rigoureux lycée Louis-le-Grand de Paris dans sa jeunesse, puis une académie de cavalerie légère qui le conduira vers une carrière militaire. À l'âge de seize ans, il est nommé lieutenant et porte-étendard des Carabiniers, une prestigieuse unité militaire d'officiers armés, et il prend part à la guerre contre la Prusse. Au début de 1759, alors qu'il avait dix-huit ans, Sade était nommé capitaine de la cavalerie de Bourgogne. Au début de sa carrière militaire, Sade s'était forgé une réputation auprès de ses pairs en tant que joueur et homme à dames, et le jeune officier déplorait souvent à la fois son manque de motivation pour faire les choses nécessaires pour réussir et l'absence d'amis proches et sincères dans son la vie. À la fin de la guerre de Sept Ans en 1763, la famille de Sade entame des négociations de mariage avec la famille Montreuil, petite noblesse de la robe pourtant extrêmement riche. Sade résista au souhait de sa famille de se marier, mais lorsque la femme dont il était amoureux le méprisa, Sade revint à Paris de Provence quatre jours avant son mariage en mai 1763 et épousa Renée-Pélagie de Montreuil, qu'il ne rencontra que la veille du mariage.

Cinq mois plus tard, le marquis est incarcéré au cachot de Vincennes pour licence et blasphème. Cette première de ses nombreuses incarcérations résultait des violences qu'il avait infligées à la jeune Jeanne Testard, qu'il avait payée pour passer la nuit avec lui dans de petits appartements loués à Paris que, comme nombre d'aristocrates, le marquis gardait pour des rendez-vous occasionnels. Lors de sa rencontre avec Testard, le marquis a d'abord demandé à la jeune femme si elle croyait en Dieu, puis a profané un certain nombre de crucifix et autres objets religieux. Il a demandé à la jeune femme de le battre avec un fouet rouge et l'a pressée de choisir le fouet avec lequel il la flagellerait. Testard fit une déposition auprès du commissaire de police, Sade fut arrêté et emmené à Vincennes, une ancienne forteresse à l'extrémité sud-est de Paris. Sade y resta moins d'un mois, mais reviendra à Vincennes ou à la Bastille à de nombreuses autres occasions pour des actes similaires de blasphème et de violences sexuelles. (Il a passé au total une trentaine d'années, y compris les années de 1801 à la fin de sa vie, en prison.) Sade a écrit la plupart des œuvres pour lesquelles il est le plus connu pendant son incarcération. Sa première pièce importante est le Dialogue entre un prêtre et un mourant, probablement composé en 1782 alors qu'il était emprisonné à Vincennes. Le dialogue traite de quelques vues standard du XVIIIe siècle sur la religion, la philosophie, le matérialisme et la raison, et le mourant conclut que c'est cette dernière faculté, plus que la foi en Dieu, qui conduit au bonheur humain. Peu de temps après que Sade ait terminé le court article philosophique, les autorités ont confisqué tous les livres du prisonnier parce qu'ils semblaient lui donner des idées inappropriées. Dans les années restantes de la décennie, Sade écrivit Les 120 jours de Sodome, les malheurs de la vertu, et Aline et Valcour, un roman semi-autobiographique. D'autres œuvres majeures consistent en un certain nombre de nouvelles et de pièces de théâtre.

Les romans du marquis de Sade combinent un intérêt philosophique pour le matérialisme, un examen intense de l'étendue et des limites de la raison humaine, et une représentation extrêmement vivante, souvent écrasante, de la violence sexuelle graphique. Tous les romans majeurs tournent autour de la planification, de la narration et de la réalisation d'actes élaborés, souvent invraisemblables de torture et de mutilation, dont beaucoup impliquent des motifs religieux. Le plus souvent, une diatribe sophistique concernant, entre autres, l'absurdité de la vertu dans une société de classe accompagne la consommation des actes violents. Les libertins qui infligent la violence dans les romans de Sade s'engagent dans une énigme philosophique ininterrompue dans laquelle ils tentent de situer les limites du langage, du pouvoir, de l'existence corporelle et de la domination. Tentant à plusieurs reprises d'anéantir physiquement et subjectivement leurs victimes, ils comptent d'autant plus sur ceux qu'ils détruiraient pour leur propre identité dans leurs tentatives de faire, dire et être tout. La dialectique que Sade construit tout au long de la majeure partie de sa fiction interroge la possibilité d'un accès sans intermédiaire à des phénomènes ostensiblement naturels comme le corps, le plaisir, la douleur et la violence intersubjective.

Presque toutes les œuvres de Sade ont été vilipendées et censurées depuis leurs toutes premières apparitions, et même jusqu'en 1956, la maison d'édition Pauvert a été condamnée à une amende pour l'impression des œuvres complètes. Néanmoins, Sade a eu une influence considérable dans les cercles artistiques et philosophiques. André Breton (1896–1966) et les surréalistes, en particulier, trouvent dans son œuvre des idées libératrices pour penser la raison et la sexualité.