Huysmans, Joris-Karl

HUYSMANS, JORIS-KARL (1848–1907), romancier et critique d'art français de la fin du siècle.

Joris-Karl (Charles-Marie-Georges) Huysmans était le fils d'un peintre hollandais et d'un musicien français. Au cours de sa vie, il n'a cessé de souligner l'influence commune de ses parents, qu'il jugeait si importante pour lui et qui avait fait de lui, comme il le disait dans son autobiographie de 1885, «un amalgame inexplicable d'un esthète parisien et d'un peintre hollandais». Ce mélange est apparu pour la première fois en 1874 lorsque Huysmans a publié un recueil de poèmes en prose intitulé Le Drageoir à épices (Un plat d'épices), un volume portant le nom de Jorris-Karl Huÿsmans, un nom qu'il pensait être la forme hollandaise de Charles-Georges Huysmans. Bien que LeDrageoir est un "bijou savamment taillé" comme le décrit le poète français Théodore de Banville, le volume n'a guère suscité d'intérêt.

Huysmans a eu plus de succès avec Marthe, histoire d'une fille (1876; Marthe), un roman publié hors de France, à Bruxelles, en raison de son sujet: la relation entre un jeune journaliste et une prostituée. L'écrivain naturaliste Émile Zola, par exemple, a complimenté le jeune écrivain en disant qu'il était l'un des romanciers du futur. Avec ça, une amitié est née. Joris-Karl Huysmans, ainsi que d'autres admirateurs tels que ses collègues écrivains Paul Alexis, Henry Céard, Léon Hennique et Guy de Maupassant, rendaient visite à Zola chaque semaine. Mais Huysmans n'est jamais devenu un véritable disciple naturaliste, son style étant, comme l'écrivain Jean Richepin le nota en 1880, bien plus captivant, idiosyncratique et coloré que la «prose pâle» de Zola.

Les Soeurs Vatard (1879; Les sœurs Vatard), En Ménage (1881; Vivre ensemble), et A Vaul'eau (1882; Avec le Flow) suggèrent déjà la direction dans laquelle le style de Huysmans évoluerait, style redevable, mais en même temps différent de celui défini dans le credo des naturalistes. Huysmans était une littérature pessimiste et misogyne, racontant la misère de la vie, forçant les hommes à fuir la société de la fin de siècle et à se réfugier du monde.

Un Rebours (Contre la nature), le bréviaire du mouvement décadent publié en 1884, est souvent considéré comme marquant un moment décisif dans la carrière de Joris-Karl Huysmans. C'était, comme l'a dit Stéphane Mallarmé, «le seul livre qu'il fallait écrire», un livre qui méprisait les principes esthétiques conventionnels (naturalistes) et qui est devenu un modèle pour une nouvelle génération d'écrivains décadents. Cependant Huysmans n'a cherché aucun disciple et a rejeté le rôle de fondateur d'un mouvement littéraire. C'est ainsi qu'il se décrit dans son journal comme une «Mère Cigogne n'accouchant que de fausses couches», une porteuse fertile qui ne produit que des fausses couches. Mais Un Rebours a également continué sur la même voie pessimiste - en Un Rebours Huysmans a exprimé, comme il l'a dit à son ami et confrère Léon Bloy, une «haine du siècle» (une haine pour son siècle) - tout en ajoutant une dimension spirituelle plus surnaturelle, qu'il considérait comme absente des écrits naturalistes.

Un Rade (1887; Encalminé), souvent considérée comme une "oeuvre à part" (une œuvre distincte), et Là-Bas (1891; The Damned), sont également des romans dans lesquels Huysmans a poursuivi sa quête d'une approche plus spirituelle de la littérature, explorant le monde des rêves en Un Rade et le milieu satanique en Là-Bas. C'est également à ce stade que la littérature et la vie personnelle de Huysmans se sont de plus en plus entrelacées. Par conséquent, la conversion de Huysmans au catholicisme en 1892 pourrait être considérée comme le résultat direct de ses recherches littéraires, d'abord sur le satanisme, puis sur le catholicisme. La fascination de Huysmans pour ces sujets l'a progressivement conduit à embrasser la religion.

Le récit littéraire de la conversion de Huysmans est raconté dans En route (1895), qui fut un succès commercial immédiat et motiva d'autres conversions à l'intérieur et à l'extérieur du pays (bien que certaines personnes aient trouvé sa conversion très suspecte). À partir de ce moment, la religion constitua un thème exclusif dans les écrits de Huysmans ainsi que dans sa vie personnelle. En 1898, peu après la publication de La Cathédrale (La cathédrale), une célébration de la cathédrale de Chartres et un commentaire sur le symbolisme chrétien, Huysmans se retire de la fonction publique, où il avait travaillé pendant plus de trente ans, et se retire à Ligugé, près du monastère bénédictin, pour vivre comme un oblat. Le refuge de Huysmans dans cette «oasis», comme il l'appelait dans son journal, ne dura que deux ans et demi. L'expulsion des moines en 1901 (en raison de la nouvelle loi sur les associations) l'oblige à rentrer à Paris. L'Oblat (L'Oblat de Saint Benoît), publié en 1903, est basé sur les expériences de Huysmans à Ligugé, racontant l'histoire d'une communauté religieuse française au début du siècle.

Pendant ce temps, Huysmans avait également publié l'hagiographie d'un saint néerlandais, Sainte Lydwine de Schiedam (1900; Saint Lydwine de Schiedam), et était devenu le premier président de l'Académie Goncourt. Mais lentement, ses problèmes de santé ont pris le dessus sur sa vie, le forçant à rester à l'intérieur et à voyager moins. Un de ses derniers voyages le conduit à Lourdes; Les expériences de Huysmans là-bas sont racontées dans le dernier livre publié de son vivant, Les Foules de Lourdes (1906; Les foules de Lourdes). Peu de temps après avoir été promu au grade d'Officier de la Légion d'honneur, Huysmans décède le 12 mai 1907 des complications d'un cancer de la bouche. Huysmans est peut-être encore connu pour son célèbre chef-d'œuvre décadent, A Rebours, Pourtant, sa réputation ne cesse de croître à mesure que les lecteurs découvrent sa cartographie du déclin du naturalisme et du développement dramatique de la foi religieuse d'un homme.