Physiocrates et physiocratie

Physiocrates et physiocratie. La physiocratie était une théorie économique qui a prospéré en France dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, et un exemple important de la science sociale des Lumières. En 1757, François Quesnay (1694–1774), le théoricien en chef de la physiocratie, rencontre Victor Riqueti, marquis de Mirabeau (1715–1789), initiant une collaboration permanente. Deux ans plus tard, Quesnay publie son Tableau œconomique, un travail que lui et Mirabeau considéraient comme le fondement de la physiocratie. Cela a été suivi par Mirabeau Théorie de l'impôt dans 1760, et le Philosophie rurale, la première exposition complète de la pensée physiocratique, en 1763. Dans les années 1760, Mirabeau et Quesnay recrutent Pierre-Samuel Dupont (1739–1817), Guillaume-François Le Trosne (1728–1780), Nicolas Baudeau (1730–1792), J. -N.-M. de Saint-Péravy (1732–1789) et Paul-Pierre Le Mercier de la Rivière (1719–1801); ce dernier a publié le récit le plus complet de la doctrine dans son L'ordre naturel et essentiel des sociétés politiques (1767). La physiocratie a également gagné des convertis en Suède, en Allemagne, en Autriche et en Italie, et Le Mercier de la Rivière s'est rendu en Russie pour consulter Catherine II la Grande (dirigée de 1762 à 1796).

La physiocratie a abordé les problèmes critiques de l'État français au lendemain de la guerre de Sept Ans (1756–1763). Les hommes d'État français voulaient comprendre pourquoi l'Angleterre avait devancé la France en richesse et en puissance, et ils cherchaient un programme pour rétablir la prééminence française. Les physiocrates offraient un diagnostic de faiblesse française: la France avait négligé l'agriculture au profit du commerce et des manufactures. La prémisse centrale de la physiocratie est que l'agriculture est la seule source de richesse. Quesnay a nié que le commerce et la fabrication produisent des richesses. L'augmentation de la valeur que la fabrication confère aux matières premières, a-t-il soutenu, ne couvre que les coûts de main-d'œuvre et de production, et un profit pour l'entrepreneur équivalent à un intérêt modéré sur son capital. L'agriculture, en revanche, paie les salaires et les coûts de production, un profit pour l'agriculteur, et laisse encore un surplus - un «produit net» - pour payer un loyer au propriétaire. Quesnay a fait valoir que le développement industriel financé par l'État en France, combiné aux efforts visant à maintenir les salaires manufacturiers bas en régulant les prix des céréales, avait appauvri l'agriculture. Les physiocrates ont également critiqué le système fiscal. Ils ont appelé à la suppression des taxes existantes et à leur remplacement par une taxe unique, qui ne devait tomber que sur le produit net. Le produit net représente tout le surplus économique de la société, ont-ils soutenu; percevoir la taxe sur les recettes autres que le produit net, c'est simplement augmenter les coûts de perception. Pour relancer l'économie agricole et régénérer la nation, les physiocrates ont cherché à remplacer la culture paysanne par une agriculture commerciale à l'anglaise. Ils ont également exigé la déréglementation du commerce des céréales, y compris un assouplissement des lois contre l'exportation, afin que le prix des céréales puisse revenir à son niveau naturel. Les physiocrates étaient des partisans doctrinaires du libre-échange, rejetant la théorie de la «balance commerciale», selon laquelle les hommes d'État doivent veiller à ce que les exportations nationales dépassent toujours les importations. Ils considéraient les droits de propriété illimités comme le fondement de la prospérité, et ils ont également plaidé en faveur de la liberté absolue de travailler, ce qui les a conduits à condamner les corporations commerciales qui réglementaient l'économie artisanale.

Bien qu'ils aient identifié l'économie de marché comme «naturelle», les physiocrates pensaient que des intérêts particuliers avaient bloqué son développement. Pour passer outre à de tels intérêts, ils ont proposé d'établir un «despotisme légal», une autorité dirigeante non entravée par des contrôles constitutionnels. Par despotisme légal, les physiocrates n'entendaient pas une règle arbitraire, mais un gouvernement sous des lois dérivées de «l'ordre naturel». Bien qu'ils suggèrent qu'une magistrature et une opinion publique indépendantes surveillent les actes du souverain, ils s'attendent à ce que l'intérêt personnel serve de principal frein à ses actions.

Au cours des années 1760, avec le soutien enthousiaste des physiocrates, l'administration française s'engagea dans un programme de réforme économique, introduisant le libre-échange national des céréales en 1763 et la liberté d'exportation en 1764. Alors que les prix des céréales augmentèrent entre 1764 et 1770, la déréglementation fut attaqué. Les physiocrates ont défendu le gouvernement dans des brochures et dans la revue physiocratique, le Éphémérides du citoyen. Ils ont également soutenu la politique de l'administration de mettre fin au monopole de la Compagnie des Indes en 1769. Quelle que soit l'influence de la Physiocratie dans les années 1760, elle l'a perdue avec la chute de l'administration réformiste en 1770. L'anti-physiocratique Abbé Terray a réinstitué la réglementation du grain commerce en 1770, et en 1772 fermé le Ephémérides du citoyen. Les physiocrates connurent une résurgence lorsque Louis XVI nomma Turgot, sympathisant physiocratique, comme contrôleur général en 1774. Le nouveau ministre rétablit le libre-échange des céréales, rétablit la Ephémérides, et déplacé contre les sociétés commerciales. Cependant, les réformes de l'opposition suscitées par Turgot le chassèrent de ses fonctions en 1776 et la physiocratie ne jouit plus jamais de la même importance.