Mendès-france, pierre (1907–1982)

Homme politique français.

Pierre Mendès-France descendait du côté de son père d'une famille juive portugaise installée à Bordeaux au XVIe siècle; sa mère appartenait à une famille juive d'Alsace. Bien qu'il ait été victime de l'antisémitisme pratiquement tout au long de sa carrière et n'a été que brièvement à la tête du gouvernement français, du 19 juin 1954 au 4 février 1955, Mendès-France était l'un des hommes politiques les plus estimés du pays à l'époque moderne.

Certaines personnes de grande capacité ne deviennent jamais proéminentes parce que les circonstances ne le permettent pas, mais ce n'était pas le cas de Mendès-France. Élu plus jeune député français en 1932 après cinq ans comme avocat - il avait à peine vingt ans lorsqu'il obtint son diplôme de droit - Mendès-France ne fit jamais de compromis en termes d'équité et presque jamais au nom des réalités politiques. L'exemple le plus significatif de son intransigeance a peut-être eu lieu en 1945, alors qu'il était ministre de l'économie nationale dans le gouvernement dirigé par Charles de Gaulle. Il démissionne lorsque son plan de réforme économique d'après-guerre est rejeté par de Gaulle, qui craint que sa rigueur ne provoque mécontentement et bouleversement dans un pays déjà affaibli par la Seconde Guerre mondiale.

Tout au long de sa carrière, Mendès-France a été particulièrement impliqué dans les affaires économiques nationales, pour lesquelles sa compétence était universellement reconnue. Après la Seconde Guerre mondiale, il a participé à un certain nombre d'organisations concernées par la finance internationale. Même après avoir abandonné le Parti radical, auquel il avait adhéré jeune, pour les socialistes en 1960, il était sceptique sur les propositions économiques des socialistes, qu'il jugeait imprudentes. Mais le socialisme était pour lui le début de la démocratie politique et économique, et malgré sa propre inclination pour l'économie, il est devenu un pur politicien.

Profondément de gauche, laïc et républicain, Mendès-France avait voulu préserver le Parti radical - parti centriste à l'origine «radical» en raison de son anticléricalisme - dans ce sens. Quand, à la fin des années 1920, il sentit le parti se déplacer vers la droite, il rejoignit un groupe de «jeunes turcs» pour le ramener sur sa voie de gauche. Il fait partie de ceux du Parti radical le plus engagé auprès du Front populaire au milieu des années 1930 et devient sous-secrétaire d'État à l'économie dans le bref second gouvernement dirigé par Léon Blum (13 mars au 8 avril 1938). Lorsque les radicaux ont déserté le Front populaire, Mendès-France s'est retrouvé, pas pour la dernière fois de sa vie, marginalisé.

Mobilisé en 1939, Mendès-France fut l'un des parlementaires qui, après la défaite française, embarqua sur le navire Massilia, dans l'espoir de poursuivre la guerre depuis l'Afrique du Nord. Mais le gouvernement de Vichy l'a fait arrêter au Maroc, ramené en France et emprisonné. Il s'échappe en juin 1941 et rejoint les Français libres, servant comme pilote jusqu'en 1943, date à laquelle le général de Gaulle le nomme commissaire aux finances du Comité français de libération nationale.

Après avoir quitté le gouvernement gaulliste à la fin de la guerre, Mendès-France se retrouve à nouveau hors des centres du pouvoir. Bien que toujours fidèle au Parti radical, il a critiqué sa politique et est resté longtemps isolé, jusqu'à la défaite cruciale de la France en Indochine à Dien Bien Phu en 1954. Il est maintenant nommé Premier ministre. Ayant refusé d'accepter les communistes au gouvernement, il a gagné leur hostilité durable. Il réussit à négocier les accords de Genève avec les Vietnamiens en 1954, mettant fin à la guerre d'Indochine et à la présence coloniale française là-bas. Bien qu'il ait accordé une «autonomie interne» à la Tunisie, il a perdu la cause de l'indépendance d'Alger, où une insurrection avait commencé en novembre 1954. En fait, il a été victime d'une coalition hétérogène qui comprenait des communistes, des politiciens de droite et les membres pro-européens du Mouvement Républicain Populaire, ainsi que les radicaux qui ne lui avaient pas pardonné de ne pas avoir soutenu la Communauté Européenne de Défense, projet rejeté le 30 août 1954. En février 1955, à quarante-sept ans, Mendès-France est chassée du pouvoir et ne reviendra jamais.

Néanmoins, il était très populaire auprès du grand public et était vigoureusement soutenu par le nouveau magazine L'Express, commencé par Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud. Mendès-France est le symbole du Front Républicain qui remporte les élections en 1956. Mais René Coty, devenu président de la république en 1953, choisit comme Premier ministre le socialiste Guy Mollet. Mendès-France, devenu ministre d'État de Mollet, a démissionné du poste en désaccord sur la question algérienne.

Lorsque de Gaulle revient au pouvoir en 1958 dans le contexte d'une crise politique et constitutionnelle, Mendès-France désapprouve. Il considérait le retour du général comme antidémocratique et restait un adversaire permanent et convaincu de la nouvelle Cinquième République. En 1958, il perd son siège parlementaire - il représente la région de l'Eure - et ne reprend ses fonctions que brièvement en 1967, en tant que député de Grenoble. Après avoir joué un rôle ambigu dans la réponse aux manifestations et aux troubles civils de mai 1968, il perd de nouveau ses fonctions électives. La dernière incursion de Mendès-France en politique fut de s'associer à Gaston Defferre lors des élections présidentielles de 1969, après la démission de de Gaulle à la suite des événements de mai 1968. Ne remporter que 5% des suffrages démontre que, si éminente que soit sa personnalité publique, il n’avait pas d’avenir en politique électorale.

Se consacrant à l'écriture et aux voyages, il a manifesté sa sympathie pour la renaissance de la coalition de gauche Union de la Gauche. Malgré sa méfiance à l'égard du socialiste François Mitterrand, qui avait été son ministre de l'Intérieur, Mendès-France est ému par son élection à la présidence en 1981.

Dans l'ensemble, la carrière de Mendès-France était singulière, et sa personnalité et sa personnalité étaient propres à l'époque où il vivait. Peut-être simplement parce qu'il était un intellectuel de haut niveau à la morale irréprochable, un Cassandra prévoyant à jamais les périls futurs, il n'a jamais pu trouver sa vraie place dans la vie politique de la France.