Lettre de cachet

Lettre de cachet. Le terme «lettre de cachet» fait référence aux mandats d'arrêt signés par le roi et délivrés à la demande des fonctionnaires royaux ou des membres de la famille. Ces lettres, dont le sceau ou le cachet de cire devait être brisé pour être lues, permettaient aux individus d'être incarcérés indéfiniment et sans recours légal. Bien qu'il soit difficile de dater leur première apparition, l'utilisation des lettres de cachet s'est accélérée au XVIIe siècle avec le développement de l'autorité royale. Au cours de la rébellion du milieu du siècle connue sous le nom de Fronde, la couronne a utilisé des lettres de cachet pour arrêter des opposants de premier plan. Une fois la crise apaisée, la Couronne a étendu la pratique au domaine de la discipline familiale, où elle a acquis sa plus grande influence et sa plus grande notoriété. Le recours aux lettres de cachet, qui s'est développé en réponse aux lacunes de la justice de l'Ancien Régime, reposait sur un consensus entre le roi et ses sujets privilégiant l'ordre public à la liberté personnelle. Les nouvelles idées sur la nature humaine et le gouvernement qui ont pris racine pendant les Lumières ont miné ce consensus et les pratiques institutionnelles qu'il avait soutenues.

Un parent ou un conjoint soumet une demande de lettre de cachet au roi via son chef de la police, le lieutenant général. Les plaintes les plus fréquentes concernaient la débauche, l'aliénation mentale, la violence physique et la dissipation financière. Les individus à tous les niveaux de la société française pouvaient recourir à une lettre de cachet lorsque d'autres options ne permettaient pas de résoudre le problème. Si la famille était riche et disposée à payer les frais, l'accusé était détenu dans un couvent ou un monastère. Des sujets plus humbles se retrouvent dans les prisons de l'Ancien Régime comme la Bastille ou dans des asiles comme Charenton. La procédure était extrajudiciaire puisque l'accusé n'avait pas accès à un avocat et n'a jamais comparu devant un juge. La durée de la détention variait de plusieurs mois à toute une vie, bien que la majorité des victimes aient été libérées en moins d'un an.

La lettre de cachet démontre la complicité entre les fonctionnaires royaux et les sujets de l'appareil policier de l'Ancien Régime. Alors que les commissaires de police ont exécuté l'arrestation, ils ont rarement lancé la demande. Les gens se sont tournés vers la police pour renforcer leurs capacités disciplinaires sur un individu indiscipliné. La monarchie a répondu à la plupart des demandes car elle considérait la famille comme une école d'obéissance et de loyauté et donc comme un modèle d'ordre politique dans le royaume. Le suppliant a toujours souligné la nature socialement perturbatrice du comportement qui menaçait l'honneur de la famille tout en donnant un mauvais exemple à suivre pour les autres. Ces arguments et leur succès à influencer les autorités reflétaient la valeur de l'honneur dans une société traditionnelle basée sur la hiérarchie et le privilège. La lettre de cachet permettait aux familles de défendre leur honneur sans risquer la publicité dommageable d'un procès.

Au cours des Lumières, des intellectuels comme Voltaire (1694–1778) et Simon-Nicolas-Henri Linguet (1736–1794) ont condamné la lettre de cachet dans leurs campagnes de réforme du droit pénal. L'écrivain libertin et futur leader révolutionnaire Mirabeau (Honoré-Gabriel Riqueti; 1749–1791) publie en 1782 une polémique à succès dénonçant les lettres de cachet après sa libération de la Bastille. Cet ouvrage, avec les traités juridiques, consolide l'image de la lettre de cachet comme outil d'autorité abusive. En 1789, l'hostilité populaire envers la pratique était unanime et ciblait la Bastille comme la prison la plus étroitement identifiée à elle. Le gouvernement révolutionnaire abolit les lettres de cachet en mars 1790.