Comité national des Écrivains

Le Comité National des Écrivains, ou Comité National des Écrivains, a été fondé en juin 1941 dans le but de faire entrer dans la Résistance française des écrivains de différentes tendances politiques et religieuses. Le poème de 1943 «La rose et le réséda» de l'un de ses membres fondateurs, Louis Aragon (1897–1982), représente le CNE et la Résistance, comme une communauté idéale réunissant écrivains staliniens et gaullistes, catholiques, juifs, protestants et athées. Les premiers membres reflètent cette diversité: Louis Aragon, ancien surréaliste, était membre du Parti communiste français; Jean Paulhan (1884–1968) était directeur de la publication chez Gallimard; Jacques Decour (1910–1942) a enseigné l'allemand et était membre du Parti communiste français; l'écrivain catholique François Mauriac (1885–1970) appartenait à l'Académie française; Édith Thomas (1909-1970), une romancière, a animé les réunions du CNE dans son appartement pendant l'Occupation; et Jean-Paul Sartre (1905–1980) rejoint en 1943, même si les communistes se sont toujours méfiés de son enthousiasme pour Martin Heidegger. À la fin de 1943, le CNE comptait quelque deux cents membres, unis dans leurs efforts pour sauver l'honneur des lettres françaises.

Parallèlement à la création d'un front uni opposé à l'occupation nazie de la France, le CNE a également cherché à réglementer la conduite professionnelle des écrivains pendant la guerre. Le CNE favorisait les publications clandestines, décourageait fortement les écrivains de publier dans des revues approuvées par les occupants nazis et fronçait les sourcils à l'abstention littéraire privilégiée, par exemple, par le poète René Char. Les membres fondateurs du CNE - Aragon, Paulhan et Decour - ont créé le journal clandestin Les lettres françaises. Le premier numéro devait être publié en février 1942, mais l'arrestation et l'exécution de Jacques Decour retardèrent la publication jusqu'en septembre de la même année. À partir de maintenant, Les lettres françaises paraissait chaque mois et publiait des manifestes, des poèmes et des articles littéraires anonymes de la Résistance intellectuelle en France, ainsi que des textes occasionnels de représentants du chanoine littéraire français: Victor Hugo, de Les châtiments en particulier; Guy de Maupassant, qui avait vécu et dénoncé une autre occupation; Alphonse de Lamartine; et Guillaume Apollinaire. Le CNE a également coopéré étroitement avec la maison d'édition clandestine Les Éditions de Minuit. Fondée en 1942, Minuit a publié des dizaines de textes littéraires pendant la guerre, dont Mauriac Le cahier noir (1943), le volume L'honneur des poètes (1943-1944), édité par Pauĺ luard, et l'immensément populaire du Vercors Le silence de la mer complète au niveau des unités (1943).

L'activité principale du CNE était cependant de dénoncer les écrivains collaborationnistes. Le tout premier numéro de Les lettres françaises choisit pour le châtiment le Nouvelle revue française, La plus prestigieuse revue littéraire d'avant-guerre de France, dirigée pendant l'occupation par Pierre Drieu la Rochelle. En novembre 1943, le CNE demanda la permission aux autorités de libération d'après-guerre de créer un conseil dédié à l'examen et au jugement de la conduite des écrivains pendant l'occupation. Cette demande d'autorisation judiciaire n'a jamais été acceptée, mais le CNE a affirmé son influence en créant des listes noires d'écrivains corrompus. La première liste a été publiée en septembre 1944 et contenait les noms d'écrivains dont la punition comprenait l'exécution pour trahison (Robert Brasillach), l'emprisonnement (Charles Maurras) et une interdiction de publier pendant plusieurs années (Jean Giono, Jacques Chardonne et Paul Morand) .

En septembre 1944, le CNE publie un "Manifeste" dans Les lettres françaises appelant les écrivains français à «rester unis dans la victoire… et dans le juste châtiment des imposteurs et des traîtres». Bien que le manifeste ait été signé par une soixantaine d'écrivains, l'idéal d'une unité nationale qui transcende les divisions politiques, religieuses et générationnelles commençait déjà à se désintégrer. Peu après la Libération de Paris, François Mauriac dénonce ce qu'il considère comme l'arbitraire des tribunaux de purge et des listes noires du CNE. Comme l'a déclaré Mauriac dans son fameux débat avec Albert Camus, le CNE et la nation française ont été trop prompts à trouver des boucs émissaires capables d'expier les crimes de la communauté. Mauriac est exclu du CNE en 1948. Jean Paulhan, démissionnaire du CNE en 1946, va encore plus loin. Pour Paulhan, en 1945, les membres du CNE n'étaient engagés que dans une prise de pouvoir qui reflétait parfaitement celle des intellectuels collaborationnistes en 1940.

À la fin de la guerre, Les lettres françaises était l'une des revues intellectuelles les plus lues en Europe, avec un tirage d'environ 190,000 1950 exemplaires. Bénéficiant du prestige de ses membres, le CNE s'est lancé dans une ambitieuse campagne de promotion de la littérature française en France et à l'étranger. Mais dans les années XNUMX, la dérive du CNE vers le stalinisme, l'inflammation des vieilles rivalités entre écrivains et la montée en puissance de publications concurrentes telles que Les temps modernes et La critique transformé le CNE d'une république clandestine de lettres en un autre exemple de polarisation de la guerre froide en France.