Laclos, pierre ambroise choderlos de (1741-1803), romancier français. Peu de choses dans la vie de l'officier militaire offrent un indice que Choderlos de Laclos était destiné à écrire l'un des romans français les plus controversés et les plus influents du XVIIIe siècle. Né à Amiens dans la petite noblesse, il choisit une carrière militaire dans les années 1760. La France était en paix et la vie de caserne était régulièrement ennuyeuse. Il a écrit de la poésie, des contes érotiques et un opéra comique, Ernestine, qui a échoué lors de sa production (1777). En 1779, après avoir été promu capitaine et envoyé pour fortifier l'île d'Aix, il commença à élaborer le plan de son roman, Les liaisons dangereuses, composé alors qu'il était en congé à Paris, et publié en 1782. Il rencontra un succès immédiat et un scandale. Il prend rapidement une mission militaire à La Rochelle pour éviter la polémique, et y rencontre Marie Soulange-Duperré, avec qui il a un enfant avant de se marier en 1784.
Sa critique des fortifications françaises (1786) le rendit également controversé dans l'armée, et il partit bientôt pour servir comme secrétaire de Louis-Philippe, duc d'Orléans (1725-1785). A cette époque, il a écrit plusieurs tracts sur des sujets militaires et politiques. Pendant la Révolution française, il fut protégé par Georges-Jacques Danton (1759-1794) - membre de la Commune de Paris et ministre de la justice de la nouvelle république - emprisonné, néanmoins, pendant le règne de la Terreur, libéré et finalement fait brigadier. général (1800) par Napoléon Bonaparte (1769–1821). Nommé à un poste à Naples, il mourut en Italie de dysenterie en 1803.
La réputation de Laclos repose sur son unique roman, Les liaisons dangereuses. L'intrigue implique des tentatives d'interconnexion de séduction et de trahison au sein d'un segment fermé et élite de la société. Le vicomte de Valmont est encouragé par son ancienne maîtresse, la marquise de Merteuil, à séduire la naïve et innocente Cécile Volanges, fiancée à un jeune homme, Danceny, sur lequel Mme de Merteuil cherche à se venger. Dans un premier temps, Valmont refuse, préférant au contraire courtiser la vertueuse épouse du président de Tourvel. Elle semble céder lentement, alors que les deux libertins (Valmont, Merteuil) se ridiculisent amèrement. Mme de Merteuil envoie à Valmont une longue leçon de séduction (lettre 81) et fait semblant d'être séduite par Prevan. Pendant ce temps, Valmont, apprenant que la mère de Cécile a prévenu la femme du président de ses desseins sur elle, décide d'accepter le défi de Mme de Merteuil et devient l'amant de Cécile. La femme du président, toujours amoureuse de Valmont, lui cède enfin. Mme de Merteuil demande à Valmont de sacrifier son amour pour la femme du président s'il espère la reconquérir, et le vicomte s'exécute. Plutôt que de trouver l'amour, cependant, les deux libertins sont en guerre l'un contre l'autre et se divulguent les lettres de l'autre. Jeune homme amoureux de Cécileisfurious et tue Valmont en duel, Cécile entre dans un couvent, et Mme de Merteuil, disgraciée et défigurée par la petite vérole, fuit la société qu'elle avait appelée «ce grand théâtre».
Le roman épistolaire est structuré comme une série de lettres personnelles échangées entre les personnages principaux. L'absence de narrateur et les perspectives contradictoires et concurrentes présentées par les différents auteurs de lettres créent un ton moral ouvert et ambigu qui a choqué de nombreux lecteurs contemporains. L'œuvre peut être vue comme une promotion de la séduction à travers la présentation par Valmont et Merteuil d'une tactique détaillée et d'une rhétorique de la tentation, ou comme condamnant cette débauche par l'échec et la défaite des libertins. L'amoralité des séducteurs et de leurs victimes est représentée directement, avec une neutralité qui fait paraître le roman lui-même amoral, sinon immoral.
L'utilisation exclusive des lettres des personnages indique aussi effectivement l'hypocrisie de la société polie, car elles révèlent souvent de grandes différences entre la conduite publique et privée. D'un côté l'illusion, de l'autre la réalité de Valmont et de Merteuil, que Charles Baudelaire (1821–1867) qualifie de «veille satanique». Tous les personnages conservent une façade vertueuse, bien que les tentateurs se révèlent leurs véritables intentions et leurs machinations sournoises. Les femmes les plus innocentes révèlent par leurs lettres leur lente descente en cédant à Valmont. Nous apprenons qu'il ne cherche pas seulement à les corrompre mais à ruiner leur réputation, car il envisage d'utiliser leurs lettres d'amour comme preuve. Cependant, lorsque Valmont et Merteuil se révèlent les lettres de l'autre vers la fin du roman, ces missives servent de preuve de leur duplicité et de leur corruption, les ruinant et conduisant à leur disparition.
Laclos se considérait comme un disciple de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), et nous ne le voyons pas seulement dans la forme épistolaire du roman, comme dans le philosophe Julie, ou la nouvelle Héloïse (1761; Julie, ou la nouvelle Eloïse), mais aussi dans son contenu. Rousseau voit la société et l'écriture comme des influences corruptrices, opposées à un état naturel de pureté et de langage oral. Dans le roman de Laclos, la dégradation morale et l'écriture de lettres sont inextricablement liées. Les versions cinématographiques modernes du roman ont considérablement étendu la popularité et l'influence de l'œuvre.